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Le billet d’Édouardde Frotté Le billet d’Édouardde Frotté

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Oui, J’ai participé, voici bien longtemps, à des barrages de route. C’était sans enthousiasme, et si un médecin se présentait, on le laissait fort heureusement passer. J’ai vu, depuis, le lait déversé sur la chaussée ou le fumier répandu devant la préfecture.

Attirer l’attention sur le drame paysan et s’en prendre aux représentants du pouvoir est, si l’on peut dire, « de bonne guerre ». En revanche, j’ai tendance à croire que prendre le public ou les médias en otage est « de mauvaise guerre ». D’abord, ça rappelle la guerre, la vraie, où des innocents devaient payer pour l’action d’autrui, cette action fût-elle justifiée par les circonstances. Ensuite, j’ai peine à croire qu’une grève ou qu’une manifestation qui bloque, parfois sévèrement, le cours de la vie n’engendre pas, à terme, des exaspérations et aussi des malheurs visibles ou insoupçonnés, capables de retourner l’opinion contre leurs auteurs. Certes, écrivait Albert Camus, la démocratie, ce n’est pas la loi de la majorité mais la protection de la minorité. Heureusement, la minorité, lorsqu’elle est patiente, peut s’exprimer par les urnes.

Elle peut aussi utiliser la pédagogie dont fait partie la marche sans dégradation ni violence à travers les rues. À cet égard, il me souvient du jour en 1982, où plus de 100 000 paysans défilèrent dans Paris.

Les citadins aux balcons paraissaient ravis ; la plupart pouvaient bien avoir un grand-père paysan. Et ne parlons pas des bistrots ! Tous voyaient avec curiosité et plaisir passer des groupes bien organisés représentant les provinces françaises, et en conclure qu’il importait de sauvegarder les campagnes. Cependant, perturber sans relâche la vie en imposant par la force, non pas la sauvegarde mais le bon vouloir d’une minorité, cela peut conduire à un regain de virulence ainsi qu’au rejet des principes fondamentaux même de la démocratie.

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